(Français) Une étude allemande pointe les bénéfices économiques de la migration
EUROPE, ORIGINAL LANGUAGES, 27 Jul 2015
Dario Sarmadi, EurActiv – TRANSCEND Media Service
22 juil 2015 – La République fédérale devrait repenser son aide au développement et sa politique d’asile, estime une nouvelle étude de l’université d’Osnabrück, appelant les responsables politiques à voir la migration comme une opportunité plutôt que comme une menace.
Une étude récemment publiée par l’Université de Osnabrück montre que le programme sur les migrations intitulé « Combattre les causes de départ » lancé par ministère allemand du Développement (BMZ) dervait être abandonnéCommandité par l’ONG pour le développement Welthungerhilfe, le document souligne que la migration à partir de pays en développement vers des pays plus riches peut contribuer au développement social et économique des pays d’origine, grâce aux transferts d’argent et aux nouvelles compétences acquises, expliquent les auteurs.
Migrations positives
Les pays cibles peuvent eux aussi tirer profit de l’immigration. Les régions à fort taux d’immigration ont toujours été le centre d’innovation et de productivité, souligne l’étude.
« L’aide au développement doit faire de la migration un modèle de réussite et non pas lui faire obstacle comme cela a été le cas jusqu’à présent », a déclaré Danuta Sacher de l’ONG Terre des hommes.
Les responsables politiques doivent affronter la réalité, qui est qu’un nombre croissant de personnes soumises à la pauvreté et à la violence fuient leur pays pour se rendre en Europe.
« La migration ne devrait pas être perçue comme une menace pour la sécurité. Nous vivons dans un monde interconnecté, dans lequel nous n’avons pas besoin de barrières aux frontières et de restrictions, mais plutôt de concepts pour établir une cohabitation complexe », a-t-elle assuré.
Politique ad hoc sur la fuite et la migration
« Le monde entier ne frappe pas à notre porte », a déclaré l’un des auteurs de l’étude Jochen Oltmer, professeur à l’université d’Osnabrück. En effet, 86 % des réfugiés recensés dans le monde sont actuellement situés dans des pays de l’hémisphère sud.
Pourtant, pendant des années, l’Allemagne et l’Europe ont privilégié une réponse ad hoc au problème de la migration, a déclaré Jochen Oltmer.
Les discussions se sont concentrées sur les moyens d’empêcher la fuite des réfugiés plutôt que sur leur protection, a-t-il ajouté. Ce genre de comportement revient à appeler les ouvriers avant que l’architecte ait approuvé le plan de la maison.
Au vu de la situation mondiale des réfugiés, a-t-il continué, la politique de développement n’a pas les compétences nécessaires pour entraver ou orienter les mouvements des réfugiés lorsqu’ils fuient les nombreux points névralgiques du monde.
Elle devrait donc plutôt contribuer à la prévention des conflits et à la résolution pacifique des conflits quand les réfugiés retournent dans leur pays d’origine, à la reconstruction et à la réintégration, a ajouté Jochen Oltmer, qui insiste également sur l’information à fournir aux migrants potentiels sur les canaux d’immigration légaux vers l’Europe.
Pour y parvenir, la politique de développement devrait être décidée de concert avec d’autres services politiques. Pour Jochen Oltmer, la politique du marché du travail en Allemagne peut être prise comme exemple. Les migrants et réfugiés doivent pouvoir accéder facilement et rapidement à des emplois légaux, a-t-il estimé.
Non à la « carte bleue » pour les réfugiés
La recherche d’emploi est particulièrement difficile pour les demandeurs d’asile en Allemagne. La plupart d’entre eux sont pourtant tout à fait instruits et ont même des professions où les travailleurs qualifiés sont trop peu nombreux.
Le week-end dernier, le président de l’agence allemande pour l’emploi, Raimund Becker, a déclaré que les réfugiés hautement qualifiés devraient bénéficier de nouveaux moyens d’accéder au marché de l’emploi.
Selon lui, la fameuse « carte bleue » qui attire des travailleurs qualifiés des pays tiers, pourrait aussi attirer les demandeurs d’asile qualifiés.
Actuellement, seuls les travailleurs ayant un diplôme universitaire peuvent postuler puis emménager en Allemagne avec leur famille. Au préalable, ils doivent cependant avoir trouvé un emploi permanent, à un salaire minimum fixé et avoir terminé leurs études.
À l’avenir, estime Raimund Becker, les réfugiés hautement qualifiés et leur famille devraient pouvoir sortir du processus d’asile et obtenir un nouveau statut de travailleurs immigrants qualifiés grâce à la « carte bleue ».
Cette initiative a toutefois été rejetée par le ministère des Affaires intérieures. Cité le 20 juillet dans le Rheinische Post, le secrétaire d’État parlementaire, Günter Krings, s’est dit inquiet qu’une telle mesure n’encourage à des abus du système d’asile.
« Le nombre de candidats à l’asile monterait en flèche », a mis en garde le chrétien-démocrate. Günter Krings est donc contre le fait de mélanger la procédure d’asile avec celle de la « carte bleue ».
Lundi, un porte-parole du ministère des Affaires intérieures a franchi une nouvelle étape dans le débat. Pour l’Allemagne, a-t-il dit, il n’y a aucune « demande de modification de la loi » à ce sujet.
Contexte:
Depuis 1999, l’UE œuvre à la création d’un régime d’asile européen commun et à l’amélioration de son cadre législatif actuel en matière d’immigration.
De nouvelles règles européennes ont été approuvées. Elles définissent des normes communes et des critères de coopération afin de garantir le traitement équitable des demandeurs d’asile dans le cadre d’un système ouvert et juste, et ce peu importe le pays dans lequel ils formulent leur demande.
Les États membres de l’UE ont toutefois rejeté une proposition de la Commission européenne, qui souhaitait appliquer le principe de solidarité, pour que les demandeurs d’asile des pays les plus touchés par l’arrivée de migrants soient redirigés vers d’autres États membres.
Le nombre d’immigrants clandestins entrant en Europe a presque triplé en 2014, atteignant 276 000 personnes, selon Frontex, l’agence européenne de contrôle des frontières. L’écrasante majorité d’entre eux, près de 220 000, arrivent via la Méditerranée, un passage extrêmement dangereux.
La situation chaotique en Libye a entrainé une hausse des bateaux quittant les ports libyens sans surveillance à destination de l’Europe. Ces bateaux transportent des réfugiés fuyant les conflits et la pauvreté des pays du Moyen-Orient et d’Afrique.
En 2013, après des centaines de noyés lors d’un accident au large de l’île de Lampedusa, le gouvernement italien a lancé l’opération de recherche et de sauvetage Mare Nostrum.
L’Italie n’est toutefois pas parvenue à convaincre des partenaires européens de l’aider à financer l’opération, qui coûtait jusqu’à 9 millions d’euros par mois. Certains pays estiment en effet que Mare Nostrum avait pour conséquence involontaire d’encourager les immigrants à tenter la traversée de la Méditerranée. Rome a donc été contrainte de réduire l’ampleur de l’opération.
L’Union européenne a donc mis en place la mission de contrôle des frontières Triton, aujourd’hui associée à Frontex. Jusqu’au sommet du 23 avril, Triton bénéficiait cependant d’un budget et d’un mandat réduit, et a été vivement critiqué, notamment par des groupes humanitaires et l’Italie, qui le juge inadapté à l’ampleur de la crise.
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Un article d’EurActiv Allemagne. Traduit par Marion Candau.
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